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L’accès à l’eau potable, droit humain fondamental

Alors que les ressources hydriques se raréfient, la demande continue de croître et les financiers transforment l’eau en objet de spéculation, une marchandise comme une autre, menaçant les droits humains. L’accès à l’eau potable est reconnu depuis 2010 comme un droit humain fondamental par les Nations unies.

Cet article est un condensé de ressources, en complément de notre projection débat sur le thème de l’eau, du 17 avril 2021

Photo ci-jointe : Ici, en Éthiopie, une femme récupère l’eau potable d’un robinet dans le village de Wolenchiti pour la ramener à sa famille. Crédit: Anna Dubuis / DFID

Éthiopie, femme récupère l'eau potable, village de Wolenchiti | Collectif Eco-Solidaire Corée Taïwan

D’ici 2030, la demande mondiale en eau douce devrait augmenter de 50 %, causant un déficit de 40 % des ressources, selon les Nations unies. Cette augmentation de la demande en eau, corrélée à la croissance démographique, paraît aussi inéluctable que sa raréfaction accélérée par le réchauffement climatique. Les ruraux et les populations les plus vulnérables, dont l’accès à l’eau est moins sécurisé, risquent de pâtir de l’écart entre l’offre et la demande qui en résultera. Dans ce contexte, l’eau commence à être perçue comme un objet dont la valeur est directement traduisible sur les marchés financiers : un « or bleu » du xxie siècle à accaparer, puiser, traiter et vendre comme le pétrole au xxe siècle, au profit de quelques propriétaires.  

Financiarisation de l’eau, privatisation du vivant

Transformer une ressource naturelle en un bien financier, c’est d’abord séparer les différents éléments d’un écosystème pour qu’ils fassent l’objet de titres de propriété spécifiques et acquérables. La financiarisation commence par la privatisation des services nationaux d’eau, initiée il y a trente ans en Angleterre par Margaret Thatcher et reprise dans de nombreux pays d’Afrique par la suite. Si l’eau est depuis longtemps une marchandise via le commerce des eaux minérales en bouteille, le phénomène prend une autre ampleur dans certains pays où l’eau est entrée sur les marchés spéculatifs. En Australie, signale le réalisateur Jérôme Fritel dans sa récente enquête «Main basse sur l’eau», les épisodes de sécheresse sont désormais synonymes de bonnes affaires pour les financiers. Ces derniers ont mis la main sur les systèmes de distribution d’eau, entraînant la faillite des éleveurs incapables de payer le nouveau prix de cet or bleu pourtant indispensable à leur activité et à l’alimentation des populations. Aussi surprenant que cela puisse paraître, les démarches de financiarisation de l’eau déjà actées de par le monde bénéficient souvent de l’assentiment de certains groupes écologistes. La raison ? Selon ces groupes, en quantifiant la rareté d’une ressource naturelle malmenée, la marchandisation de l’eau inciterait à une consommation plus raisonnée de cette ressource.
– Source : ID4D, https://ideas4development.org/financiarisation-eau-soif-profits/

Comment est née l’idée de spéculer sur l’eau ?

Plutôt que d’anticiper cette vision d’avenir terrifiante et de prendre toutes les mesures urgentes et nécessaires pour la prévenir, l’homme préfère spéculer sur sa fortune future. Sa passion pour l’argent surpassant son humanité et la conscience de sa propre mortalité, il identifie dans la situation critique de l’or bleu, une opportunité financière. L’offre en eau diminue à cause de la pollution humaine à grande échelle et des changements climatiques associés. La demande en eau ne cesse d’augmenter du fait de l’agriculture intensive, de la courbe démographique et des besoins de nos industries. Le calcul est vite fait : voilà une ressource qui se raréfie, qui ne peut que prendre de la valeur à l’avenir et dont la demande ne s’épuisera jamais. De là est née l’idée de parier sur l’eau. La révolution financière de l’eau est en plein boum. Wall Street convertit notre eau en dollars.

La position des environnementalistes et ses dérives

Les conséquences environnementales et sanitaires d’une entrée en bourse de l’eau allaient forcément être inquiétantes. A l’aube des réflexions sur la privatisation de l’eau, pourtant, l’idée sembla pertinente aux yeux des environnementalistes. Selon certains d’entre eux, mettre un prix sur l’eau aurait pu inciter les êtres humains à moins la gaspiller et à en freiner l’appropriation. Avoir conscience de son prix favoriserait la conscience de sa valeur. C’était évidemment sans tenir compte des dérives financières à suivre.

Des conséquences inhumaines et menaçantes

La Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International exercent des pressions pour encourager la privatisation des ressources en eau. Les investisseurs ne s’y trompent pas et se précipitent sur le filon. Cela génère des situations irréalistes et destructrices. La conséquence majeure et principale de la financiarisation de l’eau, est la flambée des prix. L’eau, ressource de base à toute vie, devient très coûteuse et donc inaccessible pour les moins nantis. Quelques exemples de ces effets sont déjà connus à travers le monde. En Australie, le gouvernement a décidé de confier ses ressources en eau à des investisseurs privés. Les agriculteurs achètent de l’eau, au prix fort, à ces investisseurs. Et ceux qui ne peuvent pas payer doivent fermer boutique. Au Royaume-Uni, l’eau est privatisée depuis l’ère Thatcher. Les compagnies coupent tout simplement l’eau à ceux qui n’ont pas les moyens de se l’acheter. L’Argentine passa brièvement par une gestion privée qui généra une hausse des prix au grand mécontentement de la population, avant de retourner à une gestion publique. A l’heure actuelle, le marché boursier de l’eau représente 1100 milliards de dollars et affiche une croissance annuelle de 6%. Plus de 100 indices boursiers gravitent autour de ce marché. De nombreux fonds de placement comme HSBC, UBS, Allianz, Goldman Sachs, entre autres, spéculent sur le coût de l’eau à l’avenir. Autant de parieurs prêts à jouer avec la vie de millions de personnes tant que leur portefeuille s’en porte bien.

Les opposants à la financiarisation de l’eau

Depuis plusieurs années, face à cette tendance à la privatisation et à la financiarisation de l’eau, des associations et des activistes se sont déjà mobilisés. Une lutte inégale entre des géants de la finance, portés par des arguments déshumanisés, et des défenseurs des droits fondamentaux, de tout homme, d’avoir un accès à l’eau potable. L’issue de ce combat pourrait bien dessiner les traits de notre avenir et le destin des générations futures.
– Source : Fontaine-a-eau.com 04/2020

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